mercredi 25 juin 2014

Corrida

Tournoi à donnes préparées hier soir. Comme d'habitude, les participants ont reçu les commentaires des donnes. Le blog a donc moins d'attrait en apparence. 
Donne 29
Dlr: N
Vul: All
D86
R52
R9832
D8
543
V1087
1065
R105
RV1072
963
AD
V64
A9
AD4
V74
A9732
Mais seulement en apparence car voici une donne qui peut chuter  mais qui a été réussie plus d'une fois sur deux (5 fois sur 9 exactement). Le tableau de fréquence montre une proportion similaire avec 20 contrats gagnants à 3SA contre 21 perdants. 
Je ne sais pas comment les enchères ont tourné aux autres tables mais à la nôtre c'est Est qui a ouvert.
N    E    S    W
    1P    X    -
3K   -   3P    -

3SA
C'est cette ouverture d'est qui va complètement orienter la donne. En effet, Est a déjà un problème à l'entame. Très sagement, mon adversaire à commencé par une trèfle, prise à contre-coeur par son partenaire qui revient pique. J'ai immédiatement couvert le 10 de l'as.
Petit T pour la dame, retour au mort à la D de coeur, et défilé des trèfles sur lequel Ouest et Est défaussent tous deux 2 piques pendant que je me défais de 2 carreaux. Ayant déjà vu le roi de trèfle en ouest, je sais avec certitude qu'est possède A et D de carreau sinon il n'aurait pas pu ouvrir. J'ai alors purgé les coeurs en finissant en main et j'ai remis E en main à pique. 
Est a alors été bien obligé de tirer son as de carreau et de me donner le neuvième pli. 
Si Est n'ouvre pas, c'est Sud qui joue le contrat. Ouest entame coeur. Comme les enchères n'ont donné aucune indication, il est impossible d'adopter la même ligne de jeu. Le déclarant essaye d'abord d'affranchir les trèfles. Mais quand ouest reprend la main et rejoue pique, la tendance naturelle est de placer la dame de pique, ce qui tue le contrat.

mercredi 18 juin 2014

Faut-il pousser le contrat?

Je n'ai pas joué hier soir.
Alors en contrepartie nous allons parler aujourd'hui d'un sujet bouche-trou que je gardais pour ce genre d'occasions.

La Question
La question à résoudre est la suivante. Un contrat, tel qu'une manche, a un certain pourcentage de réussite. A partir de quel pourcentage de réussite doit-on annoncer ce contrat?
Je conseille à ceux à qui les maths ont toujours donné des boutons de sauter directement au paragraphe "Conclusions".

Le Calcul
Tout d'abord, ce problème est évidemment impossible à résoudre en tournoi par paires, puisqu'il dépend de l'attitude des autres joueurs. Concentrons-nous donc sur les matches. 
Le raisonnement à suivre est qu'il faut annoncer le contrat lorsque, en moyenne, on gagne plus de points en l'annonçant qu'en ne l'annonçant pas.
Pour simplifier, supposons qu'il n'existe que deux options: le contrat est juste fait ou chute d'une levée. Pour des calculs plus compliqués, on devrait prendre des hypothèses simplificatrices, par exemple que la chute de deux levées est trois fois moins probable que la chute d'une, etc. Mais restons sur le cas simple: ça gagne ou ça chute d'un, et prenons l'exemple d'une manche en majeure non vulnérable.
Si on annonce la manche, on marquera en moyenne 420 X le pourcentage de réussite - 50 X le pourcentage d'échec. 
Si on ne l'annonce pas, on marquera 170 X le pourcentage de réussite + 140 X le pourcentage d'échec. 
On obtient la réponse au problème en résolvant l'équation
(marque moyenne en l'annonçant) >= (marque moyenne en ne l'annonçant pas).
Comme le pourcentage d'échec = 100 -  le pourcentage de réussite, l'équation ci-dessus donne 
pourcentage de réussite >= (19000/440), c-à-d 43,2%.
Le même calcul peut être effectué pour les différentes situations possibles. On obtient le tableau suivant.


Conclusions

Pourcentage de réussite NV Vul
Manche à SA 40,5% 32,8%
Manche en majeure 43,2% 34,8%
Manche en mineure 41,9% 33,8%
Petit chelem à SA 50,5% 50,3%
Petit chelem en majeure 50,0% 50,0%
Petit chelem en mineure 47,4% 48,3%
Grand chelem à SA 67,5% 67,2%
Grand chelem en majeure 67,3% 67,1%
Grand chelem en mineure 66,0% 66,2%

Une première constatation: l'attitude face aux chelems n'est pratiquement pas influencée par la vulnérabilité. Il en va tout autrement des manches, où il faut être beaucoup plus agressif pour les manches vulnérables.
Essayons maintenant de rendre ces pourcentages tangibles. 

  • Les petits chelems doivent être annoncés lorsqu'ils ont 50% de chances de réussite. Cela veut donc dire que si le chelem dépend uniquement d'une impasse, il doit être nommé. Mais le pourcentage réel de réussite d'un tel chelem sera souvent diminué par les cas de distribution extrêmes (atouts 5-0, couleur annexe 6-1 avec as manquant pour entame + coupe, etc.). Un petit chelem ne devrait donc pas souvent être annoncé s'il dépend d'une impasse.
  • Le pourcentage de réussite des grands chelems navigue autour de 66-67%. En tenant compte des mêmes cas extrêmes pour les couleurs annexes, un grand chelem est déjà limite lorsqu'il nécessite une répartition 3-2 des atouts adverses (68%). En règle générale, les grands chelems sont les contrats où il faut être le plus prudent.
  • Une manche non vul nécessite un taux de réussite d'environ 41-42%. Il vaut donc mieux ne pas l'annoncer si elle dépend des atouts 2-2 (40%).
  • Enfin une manche vulnérable devient limite lorsqu'elle dépend d'une couleur répartie 3-3 (et seulement de cela), dont le pourcentage est de 36%. Elle ne doit en tout cas pas être annoncée si elle requiert les atouts 3-2 et une impasse (34%).

Ces chiffres sont évidemment indicatifs. Rappelons qu'ils sont basés sur des hypothèses simplificatrices. Ces hypothèses tendent à sous-estimer le pourcentage nécessaire car les contrats limites peuvent rarement gagner avec une surlevée, tandis qu'ils peuvent chuter de deux.
Les pourcentages nécessaires sont donc en réalité légèrement supérieurs. 
Néanmoins, en prenant les chiffres ci-dessus et en y ajoutant une marge de sécurité de 2-3%, je pense qu'on est dans le bon. 
Un de ces jours, je ferai le calcul pour le contre: à partir de quel pourcentage d'échec doit on contrer? Question intéressante, non?


mercredi 11 juin 2014

Il y a un pli de plus, j'vous le mets?

Quelques donnes très distribuées, hier soir. Et pourtant, c'est une main très plate qui a attiré mon attention.
Donne 20
Dlr: W
Vul: All
-
-
-
-
RDV
AV72
RV10
R54
10986
94
A86
A873
-
-
-
-

W    N    E    S
1T   -   1SA   -
2T   -    2P   -

3SA
Le système de trèfle fort que nous utilisons, avec réponse positive dans une couleur de 5 cartes, montre ici une de ses caractéristiques: c'est souvent l'opposé de la main forte qui nomme SA le premier. En naturel, c'est ouest qui jouera 3SA. Ici, c'est votre serviteur qui reçoit l'entame du 6 de coeur, confirmée comme une quatrième meilleure.
Il y a 8 plis en faisant sauter l'as de pique, et 3 possibilités pour acquérir le neuvième. l'impasse carreau (mais dans quel sens?), les trèfles 3-3, et les honneurs partagés à coeur.
Je commence donc par appeler le 2. C'est le 10 qui apparaît en N, qui insiste à C. Je capture un honneur du mariage coeur en S. Même si mon V gardé arrête la couleur, je ne vais plus pouvoir établir ma neuvième levée à coeur sans l'aide de sud.
Je joue pique, sud prend et revient intelligemment du V de T. Je passe donc à la deuxième chance, les trèfles 3-3, et je joue petit des deux mains. Sud insiste à trèfle, sachant qu'au pire il ne donne rien.
R de T, honneurs piques (ils étaient 3-3 en NS), et je rentre en main à l'as de trèfle. Bingo, les deux adversaires suivent. Contrat assuré, c'est une bonne chose. Mais n'y a-t-il pas moyen de faire +1? 
Ma foi peut-être. Je connais donc 4C, 3T et 3P en S. Il a donc 3K. S'il y possède la dame, il va être méchamment squeezé C-K quand je vais tirer mes deux gagnantes à T et P. Et de fait, Marc a commencé à s'agiter sur sa chaise et a fini par lâcher un K. Plus besoin d'impasse, et 10 plis au final.
Voici les 4 mains.
Donne 20
Dlr: W
Vul: All
743
1053
9752
D62
RDV
AV72
RV10
R54
10986
94
A86
A873
A52
RD86
D43
V109

jeudi 5 juin 2014

Jamais battue

En plus du grand chelem ci-dessous, j'ai aussi noté une donne très intéressante, mais cette fois au jeu de la carte.
Donne 22
Dlr: E
Vul: EW
RD983
85
DV86
A10
V765
43
R732
872
A
RDV10762
A105
93
1042
A9
94
RDV654
E    S    W    N
1C   2T   -   2P
3C   3P   -   4P

J'ai entamé du R de C, pris au mort.
Le déclarant est mal pris. Il a au minimum une perdante pique et 2 perdantes carreau. Il lui faut à la fois éliminer une perdante coeur devenue immédiate sur une extra-gagnante à trèfle, couper deux carreaux et manier les atouts pour n'en perdre qu'un. La tâche semble compliquée, mais Chantal s'y est attelée courageusement et a donc joué trois fois trèfle en défaussant une coeur. J'ai décidé de couper de l'as, mais comme on le verra cette décision ne change rien. 
Sur le retour coeur, nord concède alors deux carreaux. En main au mort sur le troisième tour K, il joue un trèfle maître qu'ouest doit couper. Ce n'est que partie remise, nord rejoue une quatrième fois K coupé au mort et il lui reste un petit atout pour faire une dernière impasse à l'atout et aller ensuite chercher les deux atouts restants.
On pourrait croire que la décision de couper de l'as a éclairé Chantal sur la répartition des atouts. C'est vrai. Mais ne pas couper l'éclaire presque tout autant. Tout au plus peut elle encore hésiter entre une répartition 4-1 avec l'as en E ou 5-0. Dans les deux cas, elle va jouer petit K du mort de la même façon et finir par gagner son contrat en suivant la même ligne de jeu qu'expliquée plus haut.